Comment faire face aux campements sauvages de Gens du voyage
Les troubles liés aux installations sauvages de campements de Gens du voyage (GDV) constituent un sujet de préoccupation pour beaucoup de maires et d’habitants de notre circonscription.
Force est de constater que les dispositifs législatifs actuels ne sont pas adaptés aux réalités du terrain :
  • les Gens du voyage ne sont pas satisfaits par les zones d’accueil mises à leur disposition ;
  • les implantations sauvages se multiplient et conduisent à des tensions récurrentes ;
  • les maires n’ont pas toujours à leur disposition les moyens de faire procéder à des expulsions.
Membre de la Commission nationale consultative des Gens du voyage, je travaille avec trois autres collègues députés à une proposition de loi pour adapter la législation actuelle, en renforçant la lutte contre les campements sauvages et en accompagnant mieux les collectivités dans leurs obligations en termes d’accueil.
Un constat d'échec patent

Je me suis fortement impliquée dès le début de mon premier mandat sur cette question délicate du fait de sa dimension humaine : les Gens du voyage disposent bien entendu de droits comme tout citoyen français, mais ils doivent également se conformer à la loi et respecter les zones d’implantation mises à leur disposition.

Je l’ai rappelé lors d’une réunion à ce sujet à Arbonne-la-Forêt au début du mois d’octobre : du point de vue des communes et de leurs habitants, la priorité est de permettre aux maires d’obtenir des expulsions immédiates en cas d’installation illicite et/ou de dégradation. Il faut en effet éviter les tensions avec les élus, les propriétaires de terrain et la population… qui parfois mènent à des violences inacceptables.

Pour cela, il faut nécessairement que les collectivités respectent également le schéma département d’accueil des Gens du voyage. Ce schéma est élaboré conjointement par le Préfet et le Président du Conseil départemental et définit les obligations des communes : il prescrit les besoins d’aménagement d’aires d’accueil permanentes (selon la loi du 5 juillet 2000), de terrains de grands passages, et ceux découlant de la sédentarisation des familles. Il énonce également un certain nombre de préconisations à caractère socio-éducatif.

Mais il convient également de prendre en considération la réalité du terrain et d’adapter la règlementation en conséquence. Comme j’ai pu l’entendre au travers de divers témoignages, les zones d’accueil destinées aux GDV ne correspondent pas à leurs attentes : ils préfèrent des lieux plus simplement équipés (et par ailleurs, moins coûteux à réaliser pour nos finances locales !). C’est l’une des raisons des installations sauvages sur des terrains agricoles, car ils correspondent mieux à l’environnement que recherchent les GDV…

Que prévoit la réglementation actuelle ?

L’objectif consiste à établir un équilibre acceptable entre :

  • d’une part, la liberté constitutionnelle d’aller et venir et le souhait légitime des gens du voyage à pouvoir stationner dans des conditions décentes ;
  • d’autre part la volonté tout aussi légitime des élus locaux de proscrire les installations illicites qui entrainent de nombreuses nuisances et détériorations pour les collectivités et les administrés.

L’article 28 de la loi 31 mai 1990, dite loi Besson I, avait établi diverses obligations en matière d’accueil des gens du voyage aux collectivités locales.

Dix ans plus tard, la loi du 5 juillet 2000 dite loi Besson II , relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage, a institué les obligations d’accueil des collectivités, en rendant notamment obligatoire dans chaque département la création d’un schéma fixant des secteurs géographiques où les communes doivent réaliser des aires permanentes d’accueil, des aires de grand passage et des terrains familiaux locatifs.

Les communes de plus de 5 000 habitants sont obligatoirement intégrée à ce schéma, elles doivent nécessairement disposer d’aires ou de terrains adaptés sur leur territoire, ou concourir financièrement à la réalisation d’aires d’accueil sur le territoire d’autres communes.

Faire évoluer la loi

De nouvelles solutions doivent être trouvées en concertation, par l’échange et le dialogue, entre l’ensemble des parties prenantes pour instaurer une plus grande fermeté vis-à-vis des installations illégales de gens de voyage, tout en travaillant à l’évolution des conditions d’accueil pour mieux répondre aux changements de mode de vie.

En ce sens, plusieurs propositions devraient être portées et débattues prochainement à l’Assemblée nationale :

  • Comptabiliser les aires d’accueil dans la loi SRU ;
  • Réactualiser l’ensemble des schémas départementaux d’ici fin 2025 pour coller davantage à l’évolution des modes de vie des gens du voyage ;
  • Améliorer les zones d’implantation des aires pour répondre aux nouveaux besoins des gens du voyage ;
  • Nommer, par le Préfet, un médiateur départemental pour gérer les conflits ;
  • Réduire les délais pour statuer sur une procédure d’évacuation ;
  • Instituer un « dommage écologique » comme nouveau motif d’évacuation.

Lutter contre la cabanisation

La cabanisation consiste en l’implantation sans autorisation de constructions ou d’installations diverses occupées épisodiquement ou de façon permanente, dans des zones agricoles ou naturelles, classées comme inconstructibles.

Ce phénomène est en pleine explosion et les élus, qui font face à ces installations illicites, se retrouvent bien souvent dans la plus grande difficulté à faire cesser ces constructions ou à les détruire alors qu’elles ne respectent pas le droit existant et qu’elles créent régulièrement une atteinte non négligeable sur la biodiversité.

Actuellement, malgré le concours des préfectures, les collectivités tentent d’agir mais les procédures sont souvent longues et coûteuses. Il faut en moyenne entre 18 mois et 2 ans pour obtenir ce que l’on appelle une « exécution d’office » qui permette la destruction de la construction illicite directement par l’État ou la collectivité avec un coût moyen compris entre 100 000 euros et 150 000 euros. Cette somme doit théoriquement être recouvrée auprès de la personne responsable de la « cabanisation », mais elle s’avère insolvable dans une majorité des cas.

Une des pistes d’amélioration serait notamment de renforcer les moyens à disposition de la SAFER (Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural) en élargissant, par exemple, leur droit de préemption.

Je placerai la lutte contre le phénomène de cabanisation (qui est particulièrement important sur le Sud de notre circonscription) au cœur de la proposition de loi concernant les Gens du voyage que nous porterons avec mes collègues à l’Assemblée nationale.